Edito du 4 novembre
Faut il arrêter de parler des banlieues qui flambent à la télé ?
"Le poids des mots, le choc des photos!" Vous connaissez sans doute ce slogan publicitaire qui est aujourd’hui entré le langage quotidien, et bien c’est justement à cela que sont confrontés depuis maintenant une semaine les journaux télévisés… On l’a entendu tout à l’heure, la nuit en banlieue a encore été agitée avec 400 voitures brûlées et les rédactions des chaînes de télé se posent toutes en ce moment les mêmes questions. Faut il montrer les images des émeutes, et des voitures brûlées, faut il montrer ces courses poursuites entre les casseurs et les CRS ?
Hier après-midi la rédaction de France 2 s’est même réunie pour réfléchir à la façon de traiter ces événements. Hier sur Europe 1, Arlette Chabot nous affirmait : Il n’est pas question de « déserter, mais plutôt de mettre la pédale douce, pour ne pas être des relais d'actions condamnables".
A cela trois raisons. Tout d’abord les risques pour les journalistes eux mêmes. A la télé, quand on va sur le terrain on est au moins trois : un journaliste, un cameraman et un preneur de son, et difficile d’être discret avec une caméra. Il y a 48 heures une équipe de TF1 s’est d’ailleurs faite attaquer et a du laisser aux assaillants sa caméra. Quelques heures plus tard c’est une équipe de France 2 qui a du prendre la fuite, laissant sur place leur voiture qui a été incendiée par les casseurs.
Deuxième raison, l’effet d’entraînement. Aujourd’hui passer au 20h devient un défi ! Les jeunes s’auto persuadent que, plus ils vont mettre le feu à des voitures, plus les journalistes télé viendront et ces ados auront des chances de faire l’ouverture des journaux. Leur banlieue va devenir au centre au centre l’actualité ! C’est une fois de plus l’effet pervers et incontrôlable du petit écran.
Enfin troisième question que se posent en ce moment même les chaînes de télévision, au lieu de montrer les délinquants ne vaut il pas mieux montrer d’autres aspects de la vie en banlieue. Parler des victimes, des gens qui perdent par exemple leurs voitures dans les émeutes, s’ intéresser aux parents qui sont désemparés devant la violence des enfants, et pourquoi pas positiver l’action de des associations dans les banlieues qui tentent de calmer le jeu.
Trois questions. Trois défis pour les journaux télévisés car il faut en même temps continuer à informer et tous les directeurs de l’information s’accordent sur le fait que l’on ne peut pas de toute façon occulter ces événements.
Alors les télés en font elles trop ? Non s’insurge Robert Namias, le patron de l’info de TF1. Il précise : « Quand vous accordez dans un journal télévisé national cinq, six, dix minutes à un événement de cette nature, ça ne me paraît pas du tout excessif par rapport à la réalité".
Vous le voyez la situation dans les banlieues à donc un effet inattendu. C’est une véritable réflexion de fond qui s’est engagée dans les rédactions sur la façon de travailler et sur le poids des images.